Reste et saoule: la cour des comptes dresse un lourd bilan de la réforme pour intégrer les formations en santé.
La loi du 24 juillet 2019 avait pour but de rénover en profondeur l’accès au premier cycle des formations de médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie (MMOP) en supprimant la PACES et le numerus clausus. 4 ans après sa mise en œuvre et l’instauration des PASS (parcours avec accès spécifique santé) et LAS (licence avec option accès santé), la cour des comptes en dresse dans un rapport un accablant bilan.
Où se cache le pilote?
Covid altérant le calendrier, complexité de la réforme, pilote (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle) aux moyens trop tardifs, comité de suivi également trop tardif en sa création et inadaptation des systèmes d’information auraient, lors de la première année et selon la cour des comptes, usé étudiant·e·s, familles et personnels d’université.
Les années suivantes auraient, toujours selon la cour, permis au précité comité de prendre les mesures les plus urgentes pour permettre le fonctionnement de la réforme, mais pas d’en assurer le «plein aboutissement» et, et son abandon (3 ans après sa création) et le besoin d’une articulation de la réforme entre les différent·e·s acteur·rice·s appellerait, encore selon la cour, au besoin d’en installer un nouveau.
En outre, l’évitement des UFR hors santé, qui auraient été également dispensatrices de nombreuses formations du premier cycle universitaire concernées, aurait également affaibli les possibilités de dialogue au sein des universités.
Privé en France et à l’étranger disent merci.
L’absence d’harmonisation dans la description des formations et l’insuffisance de l’articulation avec le ministère de l’éducation nationale et les acteurs nationaux de l’orientation dans la communication desdites descriptions auraient, selon la cour des comptes, permis aux établissements privés de préparation à l’accès aux études de santé d’élargir leur offre dès la phase d’orientation au lycée.
Qui plus est, toujours selon la cour, le départ d’étudiants français vers l’étranger et des études plus coûteuses se maintiendrait.
PASS et LAS.
Selon la cour, le PASS serait le choix premier des étudiant·e·s souhaitant accéder aux filières à 95 % et l’inscription en LAS subie dans 53 % des cas.
De plus, cette dernière serait, toujours selon la cour, souvent effectuée pour des raisons tactiques.
A cela s’ajoute que la possibilité de suivre des enseignements hors santé dans les PASS serait, encore selon la cour, surtout vécu comme un obstacle à la réussite dans les enseignements en santé et ne permettrait, une nouvelle fois selon la cour et au mieux, qu’à éloigner les étudiant·e·s les suivant des disciplines suivies (près de 80 % des étudiant·e·s ne poursuivant pas en MMOP se réorienteraient ainsi dans une autre discipline que celle suivie).
Enfin, la mise en place d’oraux pour la sélection des candidat·e·s seraient, une dernière fois selon la cour, également rejetée par ceux·lles-ci du fait de «leur hétérogénéité» et de «leur contenu».
Et les étudiant·e·s?
Selon la cour, si les effectifs auraient, en nombre, progressé:
- la réforme ne serait pas parvenue à enrayer les difficultés d’attractivité propres à la pharmacie et à la maïeutique,
- le nouveau dispositif de détermination des effectifs de professionnels à former (basé sur des concertations au niveau national et local) reposerait, du fait de «l’absence d’une coordination interministérielle forte» sur l’ONDPS (observatoire national de la démographie des professions de santé) aidé de la Drees (direction de l’évaluation, des études et des statistiques) du ministère chargé de la santé qui, faute de «moyens» ne pourrait mettre en place une «méthodologie partagée sur l’estimation des besoins de santé et des capacités de formation des établissements [ce qui] ne permet[trait] pas de garantir la pertinence des objectifs actuels»,
- «la répartition géographique des places en médecine se révèle[rait] disparate entre régions et, plus encore, entre universités, sans qu’une logique de rattrapage des inégalités n’aboutisse».
En outre, la voulue réduction du nombre d’étudiant·e·s perdant une année d’étude (63 % des étudiants ont perdu une année d’étude 2 ans après leur année d’accès santé contre 79 % avant la réforme) serait, à nouveau selon la cour, inégalitaire, le passage par le LAS vaudrait moindre chance d’accès en MMOP et plus fort risque de redoublement que par le PASS.
Enfin, plus qu’à une diversification des étudiants (géographique, académique et/ou sociale), c’est à une homogénéisation de ceux-ci qu’on aurait, une dernière fois selon la cour, assisté.
Des conclusions claires.
La cour des comptes appelle donc:
- à l’abandon de la réforme et
- à mettre une voie d’accès aux études de santé unique, potentiellement en concertation avec l’ensemble des acteur·rice·s et fondée sur une première année consacrée principalement à la santé et gérée par l’UFR en santé.